L’impact du petit-déjeuner sur le risque cardiaque, ou comment une étude de Harvard peut vous faire croire vraiment n’importe quoi (à cause d’un article bidon)

On a tous été élevés de la même manière, pas vrai ? Le petit-déjeuner est le repas le plus important de la journée. Point final, il n’y a pas à discuter. Pourtant, rien, mais vraiment rien, ne prouve que ce principe est fondé scientifiquement. Oh, je sais bien, on a tous lu un article dans un magazine (mais lequel ?) qui parlait de cette étude (mais laquelle ?) qui établit une corrélation entre le fait de bien manger le matin et de moins manger ensuite. Je répète : une corrélation.

Attention, je ne vous dis pas d’oublier le petit-déjeuner. Mais rien ne doit non plus vous forcer à en prendre un. L’important, c’est de trouver une façon de manger qui corresponde à vos envies et vos besoins, et surtout qui corresponde à votre mode de vie. Certains ont vraiment du mal à manger le matin, et il n’y a aucune raison de les forcer à commencer la journée par quelque chose de désagréable. D’autres trouvent que bien manger le matin leur évite de grignoter le reste de la journée, et il serait donc bien dommage de se priver d’un tel effet de régulation de l’appétit.

Mais de grâce, cessez de penser que le petit-déjeuner est le repas le plus important de la journée. Tous les repas sont les plus importants de la journée : vos choix alimentaires sont bien plus importants que l’heure à laquelle vous mangez.

Et cessez de croire tout ce que vous pouvez lire dans les magazines et sur Internet, ou alors essayez de décortiquer l’article en regardant la référence scientifique qui va avec. Vous voulez un exemple ? Prenons ce magnifique article du Huffington Post daté du 22 juillet 2013, qui nous explique que ne pas prendre de petit-déjeuner augmente le risque de crise cardiaque. Carrément. N’ayons pas peur d’effrayer le lecteur.

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Faut-il s’inquiéter ? J’en doute. Ce scoop estival repose sur une étude promue par des chercheurs de l’école de santé publique de Harvard, ou par le département des relations publiques de la même école, on ne sait pas trop. A les croire, ne pas prendre de petit-déjeuner augmente le risque de crise de crise cardiaque de 27%. Pas plus, pas moins.

Mais regardons de plus près les résultats de cette étude…

  • Les chercheurs ont comparé un échantillon de plus de 23 000 personnes qui prennent un petit-déjeuner avec un échantillon de 3000 personnes qui n’en prennent pas. Ce n’est pas vraiment ce qui s’appelle une comparaison équilibrée, mais passons.
  • Le taux de crise cardiaque du groupe « avec » est de 5,77% quand celui du groupe « sans » est de 5,05%. Ce qui veut donc dire, en faisant des mathématiques de base, que ceux qui prennent un petit-déjeuner ont un risque plus élevé de 14% par rapport à ceux qui n’en prennent pas… alors que l’article du HuffPo dit le contraire.
  • En regardant les modes de vie des « cobayes », on s’aperçoit que d’autres variables apparaissent, par exemple la consommation de tabac. On remarque par exemple que dans le groupe « sans », il y a proportionnellement trois fois plus de fumeurs réguliers que dans le groupe « avec ». Faut-il en déduire que ne pas prendre de petit-déjeuner amène les gens à fumer ?
  • Outre la question de tabac, on remarque aussi que les personnes du groupe « sans » font moins de sport, consomment plus d’alcool et passent plus de temps assis devant la télé. Je ne suis pas médecin, mais il me semble que ce sont là des facteurs de risque en terme de santé cardiaque…
  • Et puis, on remarque aussi que ceux du groupe « sans » sont plus souvent célibataires, or les célibataires sont généralement plus stressés, donc plus sujets aux problèmes cardiaques. Mais d’ailleurs, cela veut-il dire que ne pas prendre le petit-déjeuner augmente vos chances de rester célibataire ? Je ne sais pas, je ne sais plus, on s’y perd…

On pourrait aussi s’attarder sur les autres facteurs tels que le cholestérol, le diabète, la tension artérielle, le taux de masse grasse… Mais tout ceci deviendrait ennuyeux pour la plupart des gens. Par contre, si on prend le temps de le faire, on s’aperçoit que prendre ou ne pas prendre de petit-déjeuner n’a absolument plus aucune incidence statistique. Pour le dire plus simplement : il n’y a aucun lien entre le fait de prendre ou non un petit-déjeuner et le fait de risquer une crise cardiaque.

Dès lors, que faire ? Eh bien pas grand-chose. Si vous ne preniez pas de petit-déjeuner jusqu’à aujourd’hui et que vous commencez demain, il y a peu de chances que cela diminue vos chances de faire une crise cardiaque. Donc faites ce qui vous convient, et surtout ce qui marche pour vous. Mais ne transformez pas radicalement votre mode de vie parce que vous avez lu un article dans la presse. Le stress généré par de genre de déclarations alarmistes est sans doute bien plus dangereux pour votre cœur que d’avaler ou non un repas en vous levant.

Et l’impact sur la prise de poids ? Je ne sais pas… Je connais assez peu de personnes obèses qui oublient de manger, quelle que soit l’heure de la journée.

 



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jemabonne

 

3 commentaires sur « L’impact du petit-déjeuner sur le risque cardiaque, ou comment une étude de Harvard peut vous faire croire vraiment n’importe quoi (à cause d’un article bidon) »

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